EUGÈNE CRIQUI
Eugène Criqui
Est un boxeur français, champion du monde des poids plumes en 1923, né le 15 août 1893 dans le 4e arrondissement de Paris et mort le 7 mars 1977 à Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis).
On le surnomme la “Gueule de fer” ou la “mâchoire de fer” est un boxeur français ayant combattu dans les années 1920. Il est connu pour avoir été champion du monde en 1923 après sa terrible blessure lors de la Première Guerre Mondiale. Son palmarès est de 99 victoires pour 130 combats.
Eugène Criqui : La mâchoire de fer
Plus fort, plus endurant, plus souple
Début de carrière prometteur
Eugène est né en 1893 à Paris. Son père est garçon de café et sa mère est domestique. Dès l’âge de 13 ans, il travaille dans la ferme, mais également comme ouvrier tourneur dans une fabrique. Il ne mange pas toujours à sa faim, mais il sait ce qu’il veut, boxer. Il commence la boxe peu après pour devenir rapidement à l’âge de 19 ans, Champion de France des poids mouches.
L’année suivante, alors qu’il n’a pas encore fêté ses 20 ans, il tente de remporter le titre de Champion d’Europe contre l’anglais Sid Smith. Ce dernier a plus d’expérience que Criqui et possède une vitesse et un jeu de jambes formidables. Cela n’empêche pas le combat d’arriver au terme des 20 rounds. Le Français s’incline aux points, mais sa prestation marque tous les esprits. Son nom fait alors office d’espoir français de la boxe pour un titre mondial. Il compte dès lors, plus de 64 combats pour seulement 9 défaites.
Malheureusement, la guerre se profile. Tant d’ambitions et d’espérances réduites à néant à cause de la folie des hommes. Il va être mobilisé en 1914.
Blessure de guerre
La bataille des Éparges
Les débuts sont calmes dans l’enfer de la guerre pour Eugène Criqui. Grâce à sa réputation et son titre de champion de France, il est à l’arrière du front et entraîne les jeunes recrues notamment à la boxe.
Il participe par la suite à la bataille des Éparges. Cette bataille dure deux mois et est terriblement meurtrière. Elle est marquée par des conditions climatiques très dures, en effet la neige et la boue sont constamment présentes. L’objectif est d’atteindre la crête des Éparges pour mettre en place des batteries d’artillerie. Des dizaines de milliers de soldats tomberont du côté allemand et français durant ces deux mois, sans que l’objectif ne soit complètement réalisé. Les journées et les nuits sont longues dans le froid et l’inconfort des tranchées. Il a l’occasion de parler souvent avec son caporal et lui dit un jour ” Une carrière s’offrait à moi. Et je me retrouve ici à attendre le bon vouloir de la mort.” Sa prédiction s’est malheureusement presque réalisée …
Souffrance et convalescence
Une nuit de mars 1915 aux Éparges, dans le nord est de la France, Criqui est de garde dans une tranchée en première ligne. Il reçoit alors une balle à la tête. Les blessures sont terribles. Il faut savoir que les balles allemandes de l’époque sont différentes des balles françaises. En effet, les balles françaises pénètrent et ressortent de la chair sans causer de grands dommages. Alors que celles des Allemands se fragmentent et explosent au contact de la chair provoquant des blessures bien plus graves. Beaucoup pense qu’il est condamné, mais c’est sans compter sur l’incroyable volonté et envie de vivre du jeune champion qui s’accroche pour pouvoir encore enfiler ses gants de boxe. La balle a traversé la mâchoire, il a perdu ainsi 22 dents, sa langue a été coupée en deux. L’éclat est ressorti par le cou. Il est immédiatement mis sur un brancard et amené dans une grange pour recevoir des soins d’urgence.
Quelques jours plus tard, il est transporté près de Paris dans un service de chirurgie spécialisé. De nombreuses opérations chirurgicales vont être nécessaires pour que Criqui retrouve une vie “normale”. On lui pose alors une plaque en acier pour lui consolider le bas du visage et sa langue a été recousue. Cependant, il n’aura plus l’usage de la parole pendant de longs mois.
Commence alors un combat inédit pour Criqui. Il va devoir se battre pour survivre, ses longs mois d’opérations et de convalescence vont être les pires de sa vie. Heureusement, notre champion est déterminé, il n’a qu’une idée en tête. Guérir pour remettre le plus vite possible les pieds sur un ring. Alors que la mort lui a tendu les bras, il se bat les poings serrés pour espérer retrouver sa raison de vivre. La boxe.
Retour en boxe triomphant
La nouvelle arme d’Eugène Criqui, le punch !
Après avoir reçu la Croix de guerre de la part de Georges Clémenceau, il décide de reprendre la boxe en 1917. C’est grâce à celle-ci qu’il retrouve un but dans sa vie, malgré qu’une partie de lui ne soit morte dans les tranchées. Son nouveau surnom est désormais “mâchoire de fer“. Commence alors des mois difficiles pour récupérer son endurance, sa vitesse, sa force et sa technique. Deux ans sans combattre laissent des traces, c’est d’autant plus vrai pour Criqui.
Ses méthodes d’entraînement changent alors radicalement, il ne peut plus compter sur son menton pour encaisser les coups. Il va alors travailler avec acharnement sa puissance, sa précision des coups et son punch. L’objectif est de devenir l’un des plus puissants puncheurs de sa catégorie pour en finir le plus rapidement possible avec ses adversaires.
Des victoires et encore des victoires
Il revient sur le ring en février 1917 et gagne aux points. Cette victoire est très importante pour le moral d’Eugène. L’année 1918 est exceptionnelle pour le français, il va enchaîner 18 victoires consécutives. Tout son travail à la salle et ses nouveaux entraînements n’ont pas été vains. Il continue au fil des années à montrer son talent en envoyant presque à chaque fois ses adversaires au tapis. Ces derniers ne vont pas hésiter à insister leurs frappes sur sa mâchoire d’acier pour lui provoquer le plus de douleur possible. Mais la garde de Criqui est impénétrable, il sait protéger sa seule faiblesse. Il part ensuite en Australie où il va marquer tous les esprits. Il faut dire qu’un homme d’un mètre 62 avec une plaque en acier dans la mâchoire, qui roule sur la concurrence, ça ne passe pas inaperçu.
En septembre 1921, il devient champion de France des poids plume. Il bat le tenant du titre Auguste Grassi par KO au premier round.
Champion du monde
Après avoir montré sa domination dans sa catégorie au niveau national et européen, Eugène Criqui est désormais prêt pour le titre mondial. On lui donne sa chance le 2 juin 1923 contre Johnny Kilbane aux États-Unis. Ce dernier détient le titre depuis plus de 11 ans, mais il est sur la pente descendante et n’a plus combattu depuis presque deux ans. Quoi qu’il en soit, ce n’est pas le problème d’Eugène. Qu’importe l’état de forme de l’adversaire, ce qu’il désire plus que tout, c’est le titre. Il réussit son exploit en mettant KO son adversaire tout en faisant une démonstration de son énorme punch. On lui donne par la suite le surnom de “roi du KO”. Il devient donc champion du Monde. Il est le deuxième français à accéder à ce titre après Georges Carpentier.
Le déclin
Perte du titre mondial
Moins de deux mois après sa victoire sur l’Américain, Eugène doit remettre son titre en jeu. Il affronte Johnny Dundee, un boxeur américain d’origine italienne qui a été champion du monde des super plumes pendant deux ans. C’est un boxeur très expérimenté qui totalise plus de 330 combats durant sa carrière. Le combat tourne à l’avantage de l’Américain qui met le Français quatre fois au tapis. Mais Criqui n’aime pas rester à terre et se relève à chaque fois jusqu’à la fin des 15 rounds. Il va perdre aux points après avoir été au bout de lui-même. Cet échec est retentissant, il n’a été au sommet qu’une cinquantaine de jours avant que la concurrence ne vienne lui arracher le titre. Quelque temps plus tard, Dundee va unifier ses deux titres.
La descente est amorcée, Criqui ne va plus retrouver son niveau d’avant. Il va s’incliner de nombreuses fois lors de ses tentatives pour décrocher le titre européen, il va même se casser la main à la suite d’un combat. De même, il n’arrive pas à obtenir le titre de champion de France quelque temps plus tard. Eugène Criqui arrête la boxe en 1928.
Fin de vie
Malheureusement, Eugène Criqui devient aveugle lorsqu’il vieillit. Il s’éteint dans une maison de retraite en 1977, à l’âge de 83 ans.